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Le blog des Amis de la Cité de l'espace

Débris spatiaux et communication transparente

16 Novembre 2021 , Rédigé par Eric Tronche Publié dans #Points de vue, opinions et débats, #Actualité spatiale, #Droit de l'espace

Débris spatiaux - Space Debris - ESA/ID&Sense/ONiRiXEL, CC BY-SA 3.0 IGO

Vue d'artiste illustrant l'augmentation du nombre de débris spatiaux en orbite autour de la Terre.
Crédit image : ESA / ID&Sense / ONiRiXEL, licence CC BY-SA 3.0 IGO

Le 15 novembre 2021, la Russie a effectué un test anti-satellite (ASAT) sur un de ses anciens satellites (Cosmos 1408). La destruction du satellite a créé au moins 1500 nouveaux débris orbitaux. Eric Tronche évoque ici les questions de communication transparente en faisant un parallèle avec les activités nucléaires.

Dans le domaine nucléaire, une loi dite TSN a été mise en place au début des années 2000. Il s’agit d’une loi relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire. Elle oblige l’exploitant nucléaire à porter à la connaissance du public toute anomalie rencontrée, avec une entité de surveillance externe et indépendante. Force est de constater qu’il n’en est pas de même dans l’Espace !

En effet, l’actualité toute récente nous indique que la Station Spatiale Internationale était en alerte ce 15 novembre 2021, suite à la détection d’un débris menaçant. Dans ce cas, la procédure est éprouvée, la station modifie légèrement sa trajectoire, et les astronautes présents se réfugient dans leurs vaisseaux. C’est au passage pour cela qu’il y a toujours au moins autant de places de retour que d’astronautes présents, et que les changements de ports d’amarrage des vaisseaux se font avec l’équipage embarqué. Ce lundi, les astronautes de Crew 3 venant d’arriver avec SpaceX ont rejoint en urgence leur vaisseau Crew Dragon, il en a été de même pour les cosmonautes russes et leur Soyouz. Comme à chaque alerte, les activités retrouvent leur cours par la suite.

Ce débris proviendrait d’un tir russe depuis la Terre, vers un satellite russe ! Ces tirs de missiles depuis la Terre vers l’Espace sont rares, heureusement, mais ils participent à l’encombrement des basses couches, tout en procurant un sentiment de supériorité aux états les ayant effectués. Parmi ces états, on note donc la Russie, mais aussi l’Inde en 2019, les USA en 2008 et la Chine en 2007.

Ces tirs depuis la Terre vers des satellites échappent au traité de l’Espace de 1967. En effet, il ne s’agit pas d’une militarisation de l’Espace extra-atmosphérique, puisque le tir provient de la Terre, ce n’est qu’un tir standard, sans prise en compte de l’altitude visée ! Néanmoins, une lettre ouverte signée par des experts est sensée déboucher sur un traité visant à interdire cette pratique. Mais il faudrait y inclure les tirs nécessaires en cas de satellite ou de station en perdition, et il serait ensuite facile de maquiller un test en prétextant un risque pour les populations !

Notons aussi récemment l’alerte débris lors du premier vol de Thomas Pesquet vers l’ISS, peut-être dû à la collision entre un morceau de fusée russe de 1996 et un satellite chinois. Les agences spatiales communiquent volontairement très mal sur le sujet des collisions !

Il faudrait donc introduire cette notion de transparence, au moins au sein des agences liées à l’ISS, mais il faudrait une entité externe et indépendante pour surveiller sa bonne mise en application. De plus, il faudrait une transparence totale, pas seulement une communication sur les tirs Terre vers Espace, ou entre satellites, ou sur les collisions. Effectivement, même au niveau des modules de l’ISS, il existe un flou : Lorsque le module russe Nauka a été installé sur l’ISS à la place du vieux module Piers, les moteurs se sont brusquement mis en marche. Malgré les actions lancées par les gyroscopes de la Station, celle-ci s’est mise à pivoter, les astronautes s’en apercevant par le paysage extérieur qui n’évoluait pas normalement. Les propulseurs du module russe Zvezda sont alors mis en service, puis ceux d’un cargo russe, afin de contrer l’action des propulseurs de Nauka, et d’éviter que l’ISS ne soit vraiment en perdition. Finalement, les propulseurs de Nauka s’arrêtent, et tout rentre dans l’ordre. La Russie prétexte un problème logiciel ayant conduit à une mise en service inopinée des propulseurs, mais ne communique pas sur les causes de l’arrêt de ces propulseurs.

Sans explication transparente, comment continuer à faire confiance ? On ne peut qu’imaginer la fin de cette coopération internationale, avec l’abandon de la partie américaine à des sociétés privées, et pourquoi pas le désamarrage de la partie russe, car le dernier module lancé, Nauka, peut la rendre totalement autonome. Sachant que la Russie penche plutôt vers un partenariat avec la Chine pour l’exploration lunaire, cette nouvelle répartition ressemble bien à une scission Orient-Occident.

L’affaire des débris nous amène donc sur le champ d’une communication transparente et constructive, utopie je crois, jusqu'à ce que l’humanité soit confrontée à un problème majeur nécessitant de manière vitale la coopération de tous.

 

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