Retour sur le vol 3 du starship et infos diverses
I) Le vol 3 du Starship
Voici un lien vers un résumé vidéo du vol 3 du 14 mars 24, montage effectué par les équipes de SpaceX :
https://twitter.com/i/status/1776070700077584385
Des progrès significatifs sont faits à chaque vol, et le prochain tir prévu le mois prochain, le quatrième, corrigera à coup sûr les problèmes précédents, tout en progressant. Lors du vol 3 du 14 – 3 (jour anniversaire de la création de SpaceX il y a 22 ans), le booster se désintègre avant son retour sur terre, ou plutôt sur mer. Sur la vidéo, nous voyons clairement qu’après la séparation ship-booster, ce dernier avait une trajectoire chaotique, et les manœuvres répétitives des grid fins (les grilles de stabilisation) étaient anormales. La séparation ship-booster a désormais lieu « à chaud », c’est le hot staging, avec l’allumage des moteurs du ship alors que celui-ci est toujours arrimé au booster. Un anneau déflecteur de flammes a été ajouté, afin que la fureur des Raptor du ship ne consume pas le haut du booster. L’avantage est qu’il n’y a pas (ou moins) de rupture dans la courbe de poussée. Le booster conserve 3 moteurs allumés jusqu’à la mise en service des 6 moteurs du ship. Puis ce dernier se désarrime, le booster rallume 10 autres moteurs (la couronne interne), pivote, et entame son retour sur terre. L’inconvénient est que l’allumage du ship encore arrimé à son booster a peut-être endommagé ses grid fins, rendant la trajectoire de retour aléatoire. On note aussi un séquençage anormal du rallumage des moteurs pour le freinage final, peut-être dû à la trajectoire déstabilisée, le problème précédent en étant peut-être l’initiateur. Il est possible aussi que les ingénieurs aient voulu tester la résistance du booster avec un seul freinage plus tardif, sachant que pour Falcon 9, 2 freinages sont effectués. Cela fait beaucoup de « peut-être », SpaceX n’ayant pas communiqué sur le détail technique.
De nombreux points positifs sont à souligner :
- Tous les moteurs Raptor du booster ont fonctionné de manière nominale (les commandes hydrauliques ayant été remplacées par des commandes électriques), que ce soit au lancement, pendant les 2 minutes 44 de propulsion, ou après la procédure de retournement.
- Le pas de tir est maintenant dégagé rapidement, minimisant les dégâts au sol.
- La séparation à chaud est opérationnelle, moyennant peut-être des ajustements au niveau des déflecteurs.
Concernant le ship, il s’est désintégré à 150 km d’altitude (a priori, car la télémétrie était aléatoire !) après plusieurs pertes de contact. Mais son vol de croisière dans l’espace, pendant 8 minutes 35 à 26 000 Km/h, ainsi que le début de sa rentrée atmosphérique ont été un succès. Là aussi, il y a des points positifs :
- Tous les moteurs ont fonctionné de manière nominale, sauf lors du test de redémarrage dans le vide. Il est pourtant vital, pour un vaisseau spatial, de pouvoir rallumer ses moteurs dans le vide, même après un long moment d’inactivité. Mais pour cela, il est nécessaire de conserver un conditionnement physique et thermique. Une fuite a été remarquée, provoquant un changement de trajectoire, cette fuite est peut-être la source de l’impossibilité de redémarrage des moteurs pour la désorbitation. La ré-entrée atmosphérique a donc été erratique, avec sur la vidéo de nombreux morceaux (de glace ?) qui s’éparpillent dans l’espace !
- La communication, grâce à l’infrastructure Starlink, permet d’obtenir des vidéos époustouflantes lors de la rentrée atmosphérique, sans black-out, les « 7 minutes de terreur » sont maintenant de l’histoire ancienne. En effet, lors du retour sur Terre, le vaisseau oriente le flux vidéo des caméras, non pas vers la Terre, mais vers l’espace, vers la constellation Starlink qui rediffuse alors vers le réseau terrestre.
- La porte de soute du ship manœuvre bien (le distributeur PEZ !), même si les vidéos diffusées peuvent nous en faire douter, mais les contrôleurs au sol sont formels, cela fonctionne, tout comme le transfert d’ergols (Oxygène liquide) entre le réservoir de tête (Header Tank) et le réservoir principal.
Pour le vol numéro 4, et fidèle à son modèle de développement itératif rapide, SpaceX tentera un retour du booster en douceur sur l’océan. En effet, les coordonnées de la tour de rattrapage ont été affectées à un point précis dans l’océan, afin de tester la manœuvre d’arrivée en douceur. Si cela fonctionne, le vol numéro 5 verra le booster se faire agripper par les bras de la tour de lancement. Elon Musk estime à plus de 80 % le taux de réussite de la récupération du booster en 2024.
Et déjà se profilent les Starship V2 et V3 ! La version 3 aura une hauteur de 150 mètres pour 120 actuellement, avec 10 mètres de plus pour le booster et 20 pour le ship. La masse transportable en orbite sera doublée. Le ship disposera de 6 moteurs optimisés pour le vide au lieu de 3.
23 jours après le vol numéro 3, le booster 11 a déjà réalisé le test statique de démarrage de ses 33 moteurs. Idem pour le ship 29 qui a allumé avec succès ses 6 moteurs.
A noter qu’un second pas de tir est en construction sur le site de Boca Chica.
Comme on dit au Québec : "Pas le temps de niaiser" chez SpaceX !
II) Quelques informations diverses
La dernière Delta IV
Ce 9 avril 24 a eu lieu le 16ème et dernier tir d’une fusée Delta IV Heavy, transportant une charge secrète pour le NRO (National Reconnaissance Office), une agence de renseignement des Etats-Unis. Pour son remplacement, il faudra composer avec la Falcon Heavy, car SpaceX est sur tous les fronts ! Mais ULA dispose tout de même d’un nouveau lanceur, Vulcan, qui est déjà en service, ayant eu l’atterrisseur lunaire Peregrine comme passager principal.
La première Atlas V habitée
Début mai 24, une fusée Atlas V de ULA devrait lancer la capsule Starliner de Boeing, en configuration habitée, avec donc 2 astronautes à bord !
La Lune
Le 1er astronaute non américain à poser le pied sur la Lune serait, selon les dernières négociations, japonais. On sera quand même fiers de Thomas Pesquet si il est 2ème !
L’ISS
Un morceau de vieille batterie de l’ISS est tombé sur une maison en Floride mi-avril ! La palette de 3 tonnes de batteries usagées, évacuée de l’ISS en 2021, était sensée se désintégrer en totalité. Il en est simplement resté un petit morceau d’alliage d’Inconel de 10 cm x 4 cm pour 700 grammes. Normalement, cette palette aurait dû être placée dans un cargo devant se désintégrer à son retour contrôlé dans l’atmosphère. Mais il semblerait que certaines fois, le temps presse, et on jette les batteries par la fenêtre !
#SpaceX #Starship